« C'est dans le vide de la pensée que s'inscrit le mal.» H. Arendt.
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J’ai mis du temps à savoir que je voulais écrire et que j’étais faite pour ça.
Le système scolaire français n’est pas très fin pour aider les jeunes à trouver leur place et il suffit d’avoir rencontré le mauvais prof, la mauvaise année ou d’avoir eu du mal à adhérer aux propositions spécifiques d’un programme pour penser détester une matière ad vitam aeternam.
C’est un peu ce qu’il m’est arrivé en Première.
Ma prof avait choisi d’étudier le courant naturaliste de Zola ; que j’avais trouvé passionnant d’un point de vue culturel et technique mais repoussant d’un point de vue littéraire. J’ose dire que son œuvre L’Assommoir m’avait abattue.
C’est dire la performance de l’angle naturaliste zolien. Si crédible.
Les descriptions sordides d’orgies, l’alcoolisme, la fainéantise, et les attitudes déviantes d’une famille misérable semblant hermétique à toute forme de transcendance m’avaient inspiré un dégoût fou.
Je m’étais demandé au nom de quoi il était possible d’aspirer à si peu, voire à rien, dans une vie. Au nom de quoi préférait-on sans cesse se salir plutôt que s’embellir. Au nom de quoi pouvait-on aimer à ce point se nourrir de vide.
Et puis, au-delà de ce programme littéraire qui m’intéressait intellectuellement mais que je n’aimais pas, il y avait les fameux exercices de la dissertation et du “commentaire composé” ou “commentaire de texte”.
Je me rappelle si bien des étiquettes collées à chacun :
le commentaire de texte garantissait une note moyenne mais s’adressait aux petits joueurs
la dissertation offrait la possibilité de décrocher une note excellente autant qu’une note abyssale et s’adressait aux élèves qui avaient du chien (et du courage)
Évidemment, sans revendiquer quoi que ce soit à l’époque (ni même aujourd’hui d’ailleurs), j’avais seulement 15 ans mais il m’était impensable de jouer petits bras. Sans compter l’effet soporifique du “commentaire de texte” qui consistait à décortiquer un extrait d’œuvre littéraire et à le disséquer sous toutes les coutures pour tenter d’expliquer ce que l’auteur avait bien pu vouloir dire et comment il s’y était pris.
Je me rappelle avoir pensé à quel point il fallait avoir du culot pour prétendre interpréter les intentions d’un auteur légendaire (qui n’était plus là pour se défendre) et à quel point disséquer un texte comme un garagiste démonterait une bagnole me semblait indigne de la littérature.
Alors je choisissais régulièrement la dissertation. Et je me tapais régulièrement des notes abyssales.
Jusqu’au jour où la énième note abyssale est tombée. Celle du Bac : 7.
J’avais trouvé ça tellement injuste que j’avais exigé ma copie pour avoir une révision de copie (chose qui ne me ressemblait pas du tout d’ordinaire - hormis quand j’estimais qu’il y avait une profonde faute de jugement).
La 2e relecture avait donné ceci : “excellente plume mais totalement hors sujet”.
Ce jour-là, j’avais décidé que je haïssais le français de toutes mes forces et pour l’éternité.
Et puis, déception passant, j’ai poursuivi dans une filière scientifique, puis avec une École d’ingénieurs, puis avec un MBA en marketing - et j’ai laissé tomber ce que je pensais être une simple “matière” étriquée et sclérosante.
Il a fallu une dizaine d’années pour que je me retrouve un peu hébétée après un passage houleux de 18 mois dans l’armée de l’air (ceux qui me lisent depuis un moment savent comme j’ai détesté !) - et que je décide à nouveau de reprendre la plume, mais cette fois-ci, en public.
Dis comme ça, cela peut paraître un peu présomptueux - et pourtant - c’est bien ce que j’ai fait.
D’abord sur une page Facebook, pour rassembler des runners autour de notre pratique commune. Puis sur un blog, créé de manière totalement autodidacte de A à Z, pour partager des récits de courses (mes 1ers storytellings !), des tests de produits, des décryptages nutritionnels et autres piliers éditoriaux qui passionnaient mon audience sportive et lifestyle grandissante. Puis à peine 2 ans après la création de ce blog, quand je suis devenue la plume online à temps complet de 4 marques américaines de sport (dont Altra Running).
Quand j’ai quitté ce poste de “social media / content manager” en entreprise pour devenir freelance et créer Bend it Like Socrate, cela faisait environ 7 ans que j’écrivais online de manière intensive. 7 ans que j’étais attentive aux signaux faibles, aux leviers d’engagement, à ce qui fait une bonne histoire. 7 ans que j’exposais mes mots en public.
Je ne regrette pas le moindre effort de ce parcours.
Il m’a permis d’affûter mon regard sur le monde et sur les gens ; ma manière de le décrire et ma manière d’incarner ma voix sur le papier ou à l’écran. Qualités qui n’ont pas de prix, encore aujourd’hui, où tant de marques et de personnes tentent de percer à travers le bruit de la médiocrité, du mensonge et des news toutes plus anxiogènes les unes que les autres.
Si je vous raconte cela aujourd’hui, c’est pour vous dire que l’usage (ou le mésusage) des IA génératives me semble actuellement dangereux. Ou “ubuesque”, puisque c’est un mot dont j’aime le sens et la sonorité.
Je ne parle même plus des “starter packs” et autres trends décérébrées (si, j’adore me marrer, mais là c’est vraiment l’angoisse) - qui ont permis à Chat GPT d’atteindre le milliard d’utilisateurs récemment.
Je parle de la confiance accordée au jugement d’un robot qui ne fait qu’enchaîner des tokens (mots ou portions de mots) pour proposer une réponse séduisante. J’en ai moi-même fait les frais la semaine dernière dans l’édition “Monday m’a tuer” quand je vous présentais le contenu de mon échange avec le dernier bot Chat GPT. Ses réponses exposaient un raisonnement possible mais en aucun cas une vérité, et encore moins, une “révélation” - comme j’ai pu le laisser sous-entendre. (My bad).
Certains pros de l’IA aiment bien parler “d’hallucinations” ; d’autres de “réponses probabilistes”. Quoiqu’il en soit, il ne s’agit jamais ni d’une pensée, ni d’un raisonnement, encore moins d’un discernement. Juste d’une possibilité.
Dès lors :
Sentir ce qui semble juste et ce qui semble faux face aux possibilités proposées par les IA génératives est un devoir humain.
Savoir contester la proposition d’une IA générative (aussi confiante puisse-t-elle paraître) est aussi un devoir humain.
Savoir s’en servir ponctuellement et de manière intelligente est un nouveau devoir humain (il faut connaître son époque pour bien l’habiter).
Mais recourir aux IA gen pour substituer le temps incompressible que requiert l’apprentissage d’une compétence comme l’écriture (et je parle aussi bien de copywriting business, que de littérature, voire d’un mix des deux !) - par un prompt (aussi performant soit-il) - me replonge dans l’antre du désert spirituel et intellectuel décrit par Zola.
Si nous avons de plus en plus d’outils à notre disposition pour avancer, produire et penser plus vite, que reste-t-il de l’Homme dans son quotidien et dans sa réalité ?
Cela m’amène à rejoindre la pensée de certaines voix sages qui émergent dans le milieu bruyant des IA génératives :
l’IA est faite pour produire, l’Homme est fait pour créer.
L’erreur fondamentale que trop commettent actuellement est de se réjouir qu’un bot puisse créer à leur place.
Et la raison pour laquelle tant de personnes commettent cette erreur, est parce qu’il peut être effrayant de se retrouver face à sa destinée créatrice.
Qui suis-je quand je crée ? Quelles sont mes aspirations ? Qu’est-ce qui m’anime ? Est-ce que j’ai le droit de créer ?
Tant de questions que l’on préfère noyer derrière un prompt pour ne pas avoir à y répondre (ou même à y réfléchir).
Pourtant, et je cite un commentaire brillant de Flavien Chervet (Prospectiviste analyste de l'IA, conférencier et poète) avec qui j’ai échangé cette semaine :
« Aucune révolution technologique n’a été si profondément spirituelle et n’a tant appelé à des développements spirituels de la part des créateurs.»
J’ajoute qu’il s’agit bien de “créateurs”, pas de “créatifs”.
Tout le monde n’est pas créatif, mais tout le monde est créateur.
Encore faut-il l’assumer et le cultiver,
Où en êtes-vous ?
À bientôt, avec Force et Style 💙
Marie
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L’IA produit, l’humain crée. Ce n’est probablement pas (qu')une question de talent, mais de volonté de vouloir prendre sa part. L’IA, une révolution spirituelle en accéléré.
Encore un chemin de crête. Difficile de tenir en équilibre sur ce fil entre penser, écrire, créer - et, pour ma part, apprendre, apprendre assez pour lâcher les élastiques en confiance - et utiliser l'IA en outil sans excès, sans se laisser bouffer pensée et esprit critique. Alors c'est quoi un être humain? 🤔
Je ne sais pas. Juste : sans lien à l'autre, aucun moyen de se dire: "There is a Human after all" - ce que je me dis quand je rencontre quelqu'un de bien.