Lâchez la bride à votre créativité ! 💫
« La sensibilité de chacun, c’est son génie » (Charles Baudelaire)
Chères lectrices, Chers lecteurs,
Chères plumes ou créatures légendaires entre autres chimères,
Vous savez ce que j’en pense, la créativité est bien plus qu’un pilier.
C’est un fil rouge.
Une trame.
Elle dépasse le choix de formes, de mots ou de couleurs.
C’est une aptitude à la divergence.
Divergeons ensemble, voici notre programme 👇
1 - L’Interview de l’édition
Christophe Pimont, demi-finaliste de l’émission “Le Meilleur Pâtissier”(M6) a fondé sa marque “Sortilèges gourmands” grâce au tremplin offert par le concours TV, mais surtout…grâce à son talent, beaucoup de travail et un peu de sorcellerie 🧙♀
Il est l’invité de cette 4ème édition BILS.
2 - Ressources créatives
Des mots inspirants de la grande chef Anne-Sophie PIC, triplement étoilée au Michelin, hypersensible, hyper audacieuse et adepte “d’expression libre”. Avec les clés qu’elle nous offre, votre pouvoir créatif prendra une nouvelle dimension.
Le beat boxing d’un moine bouddhiste japonais 🇯🇵
L’épique épilogue du Duo de génie Daft Punk, qui a filmé sa désintégration officielle après 28 ans de collaboration. 💥
3 - Ça s’est passé sur Linkedin cette semaine
Place à l’exercice grisant du slam, pour la Journée Internationale des Droits de la Femme 💗
J’ai joué, est ce que j’ai gagné ? Vous me le direz.
🍫 1 - Interview de Christophe PIMONT, demi-finaliste “Le Meilleur Pâtissier, M6” et ensorceleur de papilles.
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Sneak peak :
“La créativité peut-être stoppée par le côté « commercial ».
C’est-à-dire par le fait de se freiner en se disant que ce que l’on crée doit plaire au plus grand nombre. Lorsque l’on tombe là-dedans, je pense que l’on peut vite tourner en rond avec des saveurs de plus en plus lisses, sans âme ni passion. “ (Christophe Pimont)
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Cher Christophe,
Bienvenue dans cette 4ème édition de la missive Bend it Like Socrate, dédiée à la créativité.
Notre rencontre virtuelle aura été le fruit d'un tel concours de circonstances que j'ose dire du hasard qu'il aura été créatif !
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Mais au-delà de ça, vous avez un parcours et un métier qui sont emprunts de créativité.
Pâtissier chocolatier, fondateur de la marque "Sortilèges gourmands", votre talent a été reconnu dans l'émission "Le meilleur Pâtissier" en 2016 où vous avez atteint la demie-finale ! 🏆
Votre témoignage et vos conseils partagés dans cette missive viendront nourrir ceux qui se sentent appelés d'une manière ou d'une autre par la création (textes, visuels, concepts, marques, nouveaux process, nouvelles manières d'enseigner, de transmettre, de cuisiner, ... !).
La créativité dépasse les frontières du visuel.
C'est quasiment un état d'esprit.
Une manière de voir le monde et de s'en inspirer.
BILS > J'ai envie de commencer par cette 1ère question fondamentale : comment définissez-vous la créativité ?
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Christophe : “Pour moi la créativité vient toujours d’une émotion. Ce que l’on crée va générer des émotions, un ressenti chez les personnes qui le découvriront.
Si je devais définir la créativité, je dirais que c’est la matérialisation d’une émotion.”
BILS > Vous avez appelé votre marque "Sortilèges gourmands" parce que Cyril Lignac et Mercotte vous surnommaient "le sorcier de la pâtisserie" à l'époque du tournage, tellement vos desserts étaient inattendus. Qu'est ce qui les rendait si spéciaux, si différents ?
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Christophe : “Lors de plusieurs épreuves, j’ai réalisé des desserts improbables, surprenants, ou techniquement très complexes. Les chefs Pâtissiers présents pensaient souvent que mes recettes ne pourraient pas fonctionner, et pourtant...
Ils ont été plusieurs à me surnommer le sorcier de la pâtisserie.
Je me souviens du M.O.F. Christophe Renou me disant qu’il me serait impossible de réaliser une pâte feuilletée pour un dessert créatif en trompe l’œil dans les 4h imparties et dont les mots lors de la dégustation ont été : « Tu m’as bufflé ! ».”
BILS > Au départ pâtissier amateur, vous avez décidé de passer un C.A.P. suite à votre passage TV pour vous engager pleinement dans cette voie qui n'était pas du tout la vôtre au départ (vous étiez conseiller chez Pôle Emploi si je ne me trompe pas).
Comment voyez vous le juste équilibre entre technique (donc travail implicitement) et créativité ?
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Christophe : “La technique permet d’exprimer sa créativité.
Sans technique, on se retrouve vite limité.
Pourtant l’erreur à ne pas commettre serait de se perdre en technique au détriment du plaisir gustatif. Lorsque l’on déguste une gourmandise, elle nous ramène à une émotion, que l’on en soit conscient ou non.
Cela peut-être un éclair au chocolat comme celui que l’on pouvait déguster chez sa grand-mère le mercredi après-midi ou un fraisier revisité tant en textures que visuellement, mais qui va nous rappeler l’arrivée de l’été, des beaux jours, des vacances et dont la fraicheur sera des plus bénéfique sur le moral.
Je pense donc qu’il faut toujours garder une base connue dans ses créations.
Les gourmands ont besoin d’identifier ce qu’ils mangent pour y prendre du plaisir et la plupart se régalent de desserts finalement assez simples, tel un bon Paris-Brest léger et savoureux aux parfums de l’enfance.”
BILS > Qu'est ce qui vous permet de rester créatif et de sans cesse proposer de nouveaux desserts, de nouvelles associations de saveurs, textures, expériences gustatives ?
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Christophe : “Je suis par nature une personne intéressée par l’inconnu, je me lasse assez vite de ce que je connais.
Lorsque j’estime en avoir fait le tour et être arrivé à exprimer ce que je souhaitais, je cherche de nouvelles saveurs, de nouvelles techniques et les idées viennent naturellement. Parfois, je goûte un produit et j’imagine immédiatement comment le travailler et avec quoi l’associer.
Dans ces moments-là, je suis comme un enfant, impatient d’expérimenter mes nouvelles idées.“
BILS > Les personnes créatives sont souvent inspirantes mais aussi inspirées ! Quelles sont vos sources d'inspiration (personnalité de la pâtisserie, de la cuisine ou de tout autre domaine)
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Christophe : “Comme vous l’avez évoqué, je suis venu à la pâtisserie par passion en tant qu’amateur, je me suis donc inspiré de grands pâtissiers.
J’ai été fasciné par leur vision novatrice qui donnait à la pâtisserie une finesse et une noblesse qu’elle n’avait pas jusqu’alors.
Le premier à m’avoir réellement inspiré c’est Christophe Felder, via sa collection de livres, il m’a permis d’apprendre et de comprendre les bases de la pâtisserie, c’est en plus quelqu’un de très sympathique.
Par la suite j’ai eu la chance de faire énormément de belles rencontres et de sympathiser réellement avec des personnes qui ont eu la gentillesse de partager une partie de leur savoir avec moi. Je pense évidemment à mon ami Eddy Pfister, reconnu pour la qualité de sa boulangerie (il a atteint la finale de la meilleure boulangerie de France), c’est également un excellent pâtissier toujours habité par la passion.
Benoit Couvrand m’inspire également beaucoup et ne me refuse jamais un conseil (c’est le pâtissier associé de Cyril Lignac).
Côté chocolat, j’ai appris avec mon ami Gael Majchrzak (chef chocolatier et pâtissier) qui est consultant international. Il m’a formé à distance par WhatsApp car il habite et travaille à Hongkong depuis quelques années. Gaël est une source d’inspiration et de savoir inépuisable, il est formidable.
BILS > Quel est selon vous le pire ennemi de la créativité ? Ce qui la bloque, la censure, la tue.
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Christophe : “La créativité peut-être stoppée par le côté « commercial ».
C’est-à-dire par le fait de se freiner en se disant que ce que l’on crée doit plaire au plus grand nombre. Lorsque l’on tombe là-dedans, je pense que l’on peut vite tourner en rond avec des saveurs de plus en plus lisses, sans âme ni passion.
Lorsque je crée un dessert ou un chocolat, je le crée comme j’ai envie de le manger, il est normal qu’il ne plaise pas à tout le monde, mais il séduira son public.
Et ma création suivante séduira peut-être un public différent, au final, tout le monde pourra se régaler de créations originales, savoureuses et parfois surprenantes.”
BILS > Est ce que vous avez déjà rencontré le fameux syndrome de la page blanche dans votre univers de la pâtisserie ? Une espèce de baisse d'envie, de manque d'idées, de vide créatif ?
Comment faites-vous quand vous vivez des moments moins créatifs (souvent inévitables même chez les meilleurs), pour les laisser passer et rebondir ?
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Christophe : “Il ne faut pas forcer les choses, si je suis en manque d’idées, je reviens à la base, le produit.
Je me pose la question :
“Comment puis-je le sublimer à nouveau, et différemment ?”
Et puis j’oublie.
Je sais que les idées viendront naturellement dans les jours qui suivent.”
BILS > En cette période troublée, la créativité de nombreux entrepreneurs leur a permis de dépasser la contrainte des fermetures administratives forcées voire de transformer leur business. Est ce que vous avez vous aussi innové à votre manière pour être plus fort que cette crise ?
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Christophe : “De mon côté, je travaillais essentiellement avec des restaurateurs, des traiteurs et lors de salons du chocolat, autant dire que j’avais tout faux !
J’ai donc profité du premier confinement pour apprendre à créer un site internet avec la Chambre des Métiers.
J’aime comprendre comment fonctionnent les choses. J’ai mis mon site en ligne début décembre. Je dois encore le développer, cela viendra avec le temps.
Actuellement je prépare l’ouverture d’une boutique de Pâtisserie – Chocolaterie à Perpignan pour le 26 mars, je suis dans les starting-blocks.”
BILS > Faut il selon vous cultiver sa sensibilité pour être créatif ? Est ce que l’on peut être vraiment créatif si on cherche sans cesse à maîtriser ses émotions ou sa singularité ?
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Christophe : “Ce n’est que mon avis, mais j’estime que mes créations sont l’expression de mon art.
On peut se maitriser au quotidien et tout lâcher lorsque l’on crée, c’est même peut-être encore plus puissant puisque retenu continuellement.
Je ne pense pas qu’il soit indispensable de cultiver sa sensibilité, mais il est important de ne pas l’enfouir ni la faire taire.”
BILS > Quels sont vos rêves pour Sortilèges Gourmands et pour vous à l'avenir ? Que peut-on vous souhaiter de mieux ?!
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Christophe : “Et bien déjà, j’espère que les gourmands seront au rendez-vous lors de l’ouverture de mon magasin, que je deviendrai pour eux une adresse de référence où il pourront trouver de quoi « ensorceler » leurs papilles.
Ce que l’on peut me souhaiter de mieux ?
C’est de toujours garder cette envie de faire mieux et d’innover pour peut-être apporter ma modeste contribution à la grandeur de la pâtisserie Française.”
BILS > Où peut-on vous suivre pour piocher de la gourmandise et de l'inspiration créative ?!
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Christophe :
Vous pouvez me suivre sur le site www.sortilegesgourmands.fr,
Sur le FB de Sortilèges Gourmands
BILS : Merci beaucoup pour vos réponses ! 🧙♀
Christophe : Merci Marie.
2 - Ressources créatives. 🎧 📰 🎥
1 > Chef étoilée Anne-Sophie PIC : sa vision de la créativité entre technique, émotions et audace
Dans une masterclass Majelan sur le thème : “Tradition et modernité”, la grande chef Anne-Sophie Pic consacre près de 20 minutes au seul sujet de la créativité.
Passionnante et atemporelle, sa vision du monde dépasse 1000 fois les frontières de la grande cuisine française.
Je suis certaine que les clés qui suivent vous toucheront et vous inspireront.
Voyageons !
La phrase que la chef déteste le plus : “Comme d’habitude” ! - le ton est donné.
Angoissée par l’idée d’un temps qui resterait figé, Anne-Sophie Pic nous invite à nous mettre régulièrement “en situation d’être inspirés”. “On ne crée pas quand on le décide” dit-elle, en nous incitant explicitement à protéger le temps si fécond de la rêverie.
Pour la chef, quand on crée on transmet ses expériences, ses influences culturelles et ses rêves. Ce qui est une belle et grande responsabilité.
En cuisine particulièrement, la créativité s’associe à une grande technique (forcément), au temps (incompressible) et à l’audace (nécessaire).
La chef ajoute que les périodes de crise génèrent beaucoup d’audace. Puisqu’il y a, comme j’aime souvent le dire aussi, une sorte “d’urgence de lumière”. Pour s’extraire de la nuit, rien ne vaut la créativité et le renouvellement.
La reconversion de Christophe Pimont, pâtissier chocolatier interviewé plus haut dans cette édition en est un bel exemple.
La chef Pic insiste et elle fait bien :
“On ne peut pas constamment vouloir l’efficacité (…) pour garder un regard neuf il faut créer une balance entre les moments de grande concentration et les moments de respiration libre.”
Cette missive orchestrée en cycles autour des 4 piliers : identité, style, expression par les mots et créativité, est profondément associée à cette recherche d’équilibre subtil entre analyse, réflexion et lâcher prise créatif comme émotionnel.
Le point qui suit souligné par Anne-Sophie Pic intéressera particulièrement les chefs d’entreprise :
“La capacité des équipes à émouvoir est intimement liée à sa propre manière de manager (NDLR : en tant que chef de maison de cuisine ou chef d’entreprise). Tout est lié.”
Nous voyons bien ici encore une fois à quel point la créativité est un fil rouge dans la vie et dans le monde du travail. Les “créatifs” d’une équipe ne sont pas juste les DA, les graphistes…ou les plumes !
Pour explorer sa créativité, on ne peut se passer d’un questionnement identitaire
Il faut se demander d’où on vient, quel est son ADN, et où l’on veut aller - tout en restant ouvert sur le monde.
C’est là que le positionnement de la chef entre tradition et modernité est intéressant. Je trouve sa vision fine et juste. Elle n’invite ni à la loyauté aveugle envers certaines traditions, ni à la disruption qui casserait tous les codes.
Et va jusqu’à dire qu’il faut :
“Savoir ce qui est beau dans une tradition et ce qui est lourd”
Il faut en fait autant de repères et d’ancrages que d’évolutions, en adéquation avec le temps dans lequel on vit.
Cette vision en soi est créative.
Il ne s’agit ni de rester dans le passé ni de faire 10 bonds en avant dans le futur, mais de rester en mouvement pour grandir avec son époque.
Pour conclure, parmi les créations innombrables de la chef Anne-Sophie Pic en cuisine, celle-ci vous surprendra sans doutes :
La chef a tenu fermement à casser la rupture voire la lutte historique entre la cuisine et la salle, mais aussi à éviter l’inertie créée par l’annonce (parfois longue) des plats à leur arrivée.
Temps précieux pouvant jouer sur la composition du plat lui même (baisse de température, fonte de certains aliments, etc.).
Pour palier cette fêlure, la chef a demandé au service d’annoncer le plat à venir au moment de l’installation des couverts correspondants et non à son arrivée. Cette approche qui est peut être “un détail pour vous”, pour la chef et la cuisine française “veut dire beaucoup”.
Par cette initiative, la salle réinvestit le processus créatif dans son ensemble, elle s’intègre au rituel culinaire. Les barrières tombent.
Inspirant, non ? Place au beat boxing. Oui on est comme ça chez BILS.
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PS - Dans l’édition 2 sur la « signature éditoriale », nous avions évoqué la volonté de féminiser le grade de colonelLE par l’officier supérieur Karine Lejeune. Dans ce texte, j’ai à l’inverse laissé le titre de « chef » au masculin puisque c’est ainsi que l’écrit Anne-Sophie Pic elle même. Comme vous le voyez, chaque mot est toujours une occasion donnée d’exprimer son identité.
2 > Ce moine qui beat box pour méditer
Beatboxer pour méditer ? Merveilleux.
Le genre de mix des genres qui me donne envie de BILSer 10 fois plus fort. A quoi bon s’inventer des frontières ?
Autant les faire tomber.
3 > Épilogue Daft Punk & 15’ Loop en bonus
Ah les Daft.
Toute mon adolescence.
Je n’ai pas tout aimé de leurs créations musicales mais j’ai toujours eu un immense respect pour ce duo (Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo) qui n’a jamais cessé de se réinventer.
Les aspérités de “Rolling and scratching” voire la brutalité de ce morceau me galvanisaient quand j’étais au lycée.
Et puis Daft Punk s’est mis à l’electro. Les sons étaient plus harmonieux, les beats moins abrupts. Ce n’était ni mieux ni moins bien, c’était différent.
Je retiens quand même de cette époque le merveilleux “Veridis quo” (que l’on peut s’amuser à lire “Very Disco”). Une oreille insensible à la musique Daft Punk y verrait un son à peu près sympa qui ne bouge pas beaucoup.
Quand en réalité tout change constamment dans un morceau des Daft.
Mais tout ça, c’était avant. Le duo a mis en scène sa dissolution dans une video choc de 7’58 - au seul titre “d’Epilogue”, publiée le 22 février 2021.
Et pour ceux qui comme moi, voient en Veridis Quo un mouvement perpétuel qui décuple leur créativité, voici une boucle d1h du morceau “Horizon”, encore plus planant, pour allonger le plaisir 🎧
Merci pour tout 🙏
Marie